Les conclusions du rapport sur la cigarette électronique demandé par la Ministre de la santé

Rapport de l'office français de prévention du tabagisme

Le rapport sur la cigarette électronique demandé par la Ministre de la santé en mars 2013 a été  mis en ligne ce 27 mai 2013 sur le site de l’office français de prévention du tabagisme. Ce document dont le principal rapporteur est le Professeur Dautzenberg dresse un panorama très détaillé de la Ecigarette sur plus de 200 pages et fait 28 préconisations  sur la réglementation de la cigarette électronique. Voici les principaux enseignements du rapport… 

 

Un rapport moins orienté qu’on pouvait le craindre…

Du fait d’anciennes prises de positions du Professeur Dautzenberg et de quelques réactions récentes de professionnels de la santé on pouvait être plus que dubitatifs sur les conclusions possibles de ce rapport et craindre à une tentative de médicalisation à outrance de la cigarette électronique.

J’avoue ne pas avoir encore lu dans les moindres détails les 200 pages du document cependant, il semble que l’hypothèse d’une exclusivité de la ecigarette dans les pharmacie soit finalement écartée. Ce point était de toute façon très discutable : voir l’article cigarette électronique en pharmacie : une fause bonne idée.

Même si on peut être opposé sur le fond au ton employé par moment ou sur les préconisations des experts, il faut bien avouer qu’il manquait un cadre précis pour la cigarette électronique et que ce rapport y répond.

Les 28 préconisations des experts sont les suivantes :


1. Ne pas interdire en France l’utilisation de l’ecigarette, avec ou sans nicotine.
2. Un accès des fumeurs aux e-cigarettes qui ne soit pas freiné, car au vu des données actuelles elles semblent réduire les dommages lorsqu’elles remplacent la cigarette.
3. Mettre en œuvre des mesures pour éviter toute promotion et toute facilitation de l’accès de l’e-cigarette aux mineurs et aux sujets n’ayant jamais fumé.
4. Réglementer l’e-cigarette : le produit, sa distribution et son utilisation.
5. Cette réglementation spécifique devra être globale, prenant en compte de façon cohérente tous les aspects de l’e-cigarette.
6. Les experts prennent acte que les produits qui répondraient aux procédures standard conduisant à l’obtention d’une AMM auraient un statut de médicament ;
aussi ces e-liquides et e-cigarettes avec AMM devraient alors être vendus exclusivement en pharmacie.
7. La vente en pharmacie des e-cigarettes qui auraient obtenu le statut de médicament n’exclut pas la vente des e-cigarettes et e-liquides n’ayant pas ce statut, dans d’autres points de vente hors les pharmacies.
8. Les experts recommandent que la France demande l’abrogation de l’article 18 du projet de directive européenne sur les produits du tabac si cet article impose obligatoirement la réglementation pharmaceutique pour les e-liquides à partir de 4 mg/l nicotine. Il est en effet contradictoire de proposer une réglementation spécifique des e-cigarettes et autres produits hors tabac et médicament contenant de la nicotine et de fixer des taux si bas qu’ils ne correspondent à aucune ecigarette existante.
9. Dans l’esprit de ce qui a été fait par l’ANSM en 2008, soient fixées de nouvelles limites de contenus en nicotine des e-cigarettes et de leurs recharges.
10. Porter à 18 mg/ml la concentration maximale de nicotine dans les e-liquides hors statut de médicament.
11. Volume des flacons de recharge ne dépasse pas 30 ml.
12. Porter à 40 mg la quantité maximale de nicotine contenue dans une cartouche d’e-cigarette.
13. Création d’une catégorie de « produits évoquant le tabagisme » (PET) comprenant les e-cigarettes, mais aussi :
РLes produits contenant de la nicotine qui sont ni class̩s comme produits du tabac, ni
comme médicament.
– Les produits ressemblant à des produits du tabac, même s’ils ne contiennent pas de
nicotine.
– Les produits dont l’usage ressemble à celui du tabac.
14. Dans le cadre de l’interdiction actuelle de la publicité indirecte en faveur des produits du tabac, l’interdiction de la publicité en faveur de l’e-cigarette soit mieux appliquée et contrôlée, y compris dans les points de vente.
15. Comme pour les produits du tabac, la vente des ecigarettes soit interdite aux moins de 18 ans.
16. La vente des « produits évoquant le tabagisme » (PET) ne soit pas possible en France dans les supermarchés et boutiques généralistes, mais uniquement par des établissements agréés pour cette vente.
17. Les « produits évoquant le tabagisme » (PET) fassent l’objet d’une déclaration de mise sur le marché comportant leurs principales caractéristiques.
18. Indication claire sur tous les emballages de la composition des e-liquides :
– La liste de tous les composants présents à plus de 1 % avec leur grammage/ml.
РLa liste des produits posant ̩ventuellement des probl̬mes de sant̩ et de s̩curit̩.
РLa conformit̩ aux normes de qualit̩ requises pour les produits pharmaceutiques et
alimentaires.
19. Concentration en nicotine des cartouches et des cartomiseurs remplis et scellés soit identifiable sur le produit lui-même.
20. Fabricants de produits évoquant le tabagisme soient dans l’obligation de déclarer la liste des arômes et ingrédients utilisés en conformité avec le règlement d’exécution (UE) n° 793/2012 de la commission du 5 septembre 2012 et d’apporter les références disponibles sur leur innocuité à court et long terme en inhalation.
21. Toutes les e-cigarettes et autres produits ou accessoires évoquant le tabagisme destinés à la vente comportent un avertissement sanitaire conforme et une notice comprenant une information standardisée et l’adresse d’un service consommateurs, et ceci qu’elles contiennent ou non de la nicotine.
22. L’utilisation d’e-cigarettes et de tout « produit évoquant le tabagisme » (PET) soit interdite dans les endroits où il est interdit de fumer en modifiant l’article R3511-1 du Code de la santé publique : «… l’interdiction de fumer et d’utiliser la cigarette électronique et tout autre produit évoquant le tabagisme dans les lieux affectés à un usage collectif mentionnée à l’article L. 3511-7 du Code de la santé publique ».
23. Interdites les allégations du type « pour fumer là où c’est interdit » car c’est une incitation indirecte au tabagisme interdite par la loi.
24. Interdites toutes les promotions de l’utilisation des e-cigarettes dans des lieux non-fumeurs.
25. Les e-cigarettes ne soient pas utilisées par les femmes enceintes ou allaitantes du fait de l’absence de toute donnée démontrant leur efficacité et leur totale innocuité dans ces conditions.
26. En l’absence d’études scientifiques précises sur une utilisation supérieure à 6 mois de l’e-cigarette : vigilance en ce qui concerne son utilisation prolongée, ceci aussi longtemps que des données à long terme ne seront pas disponibles.
27. Toutes les études concernant l’efficacité de l’e-cigarette dans l’aide au sevrage tabagique et l’innocuité de son utilisation à long terme doivent être encouragées, et être totalement indépendantes des fabricants de ce produit.
28. Les experts recommandent que les présentes recommandations fassent l’objet d’une réactualisation régulière.

…mais des interrogations subsistent

Si ce rapport est globalement positif, il reste des parts d’ombres sur plusieurs points sur lesquels je reviendrai très prochainement. En particulier quel serait le type d’agrément pour les boutiques vendant des cigarettes électroniques ? Y aurait-il une formation comme les buralistes ? D’ailleurs quid des buralistes et de la distribution exclusive demandée par certains députés. Le point 20 me semble également problématique : « apporter les références disponibles sur [l’] innocuité à court et long terme en inhalation [des arômes utilisés dans la cigarette électronique] » risque d’être très complexe et très coûteux à mettre en oeuvre par les fabricants et conclure sur l’innocuité à long terme prendra beaucoup de temps…On peut aussi se poser la question de la justification de l’interdiction de la cigarette électronique dans les lieux publics alors que plusieurs études (dont une du Professeur Dautzenberg) montrent une absence de E-tabagisme passif. Il y a d’autres points qui m’interpellent mais je préfère lire intégralement le rapport avant de me prononcer,

Si vous aussi vous trouvez que ce rapport pose quelques questions vous pouvez les mettre en commentaire de cet article. Le 28 mai 2013 aura lieu le colloque de la journée mondiale sans tabac organisé par le Ministère des Affaires Sociales et de la Santé. Le Professeur Dautzenberg y présentera les conclusions de son rapport lors d’une table ronde. Absolut Vapor y sera présent et nous espérons pouvoir poser des questions pour avoir plus de précisions.

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Sylvain Filatriau