Cigarettes électroniques en pharmacie : une fausse bonne idée

Enseigne pharmacie

Les cigarettes électroniques, bientôt disponibles uniquement en pharmacie ?

Certains médecins préconisent que la cigarette électronique ne soit délivrée qu’en pharmacie, arguant que les produits doivent être réglementés et contrôlés. De plus certains ajoutent même que les fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer bénéficieraient ainsi de l’appui de leur médecin et de leur pharmacien. C’est notamment le cas de William Lowenstein, médecin, spécialiste des addictions et président de « SOS addiction » qui a récemment été invité dans l’emission C à dire sur France 5 le 16 mai 2013. De premier abord, cela ne semble pas absurde et pourtant cela aurait certainement  conséquences négatives pour les consommateurs…

Une prise de position très favorable à la Ecigarette

Il y a quelques jour, William Lowestein s’est exprimé sur la cigarette électronique dans une émission télévisée. Pour rappel, le docteur William Lowenstein est spécialisé dans la recherche et le traitement des dépendances. C’est également le président de l’association SOS addictions et l’auteur de nombreux ouvrages, dont « Ces dépendances qui nous gouvernent », publié chez Calmann-Lévy en 2005.

Comme on peut le voir dans cette vidéo, il est très enthousiaste sur la Ecigarette. Pour lui « c’est une opportunité fabuleuse » :

Pour expliquer le succès de la cigarette électronique parmi les fumeurs il évoque :


« plusieurs populations : certains, et c’est ça qu’il va falloir soutenir veulent arrêter de fumer et ont d’énormes difficultés avec cette addiction qui est une addiction sévère, à la fois neurobiologiste et comportementale, d’autres veulent continuer de fumer mais sans en mourir ce qui est légitime et puis d’autres vont vouloir arrêter de fumer en faisant des économies puisque l’histoire de la cigarette électronique permet de dépenser 4 fois moins »

Ensuite pour parler de l’avantage sur la santé de la cigarette électronique il dit :


« Le problème dans la cigarette se sont d’abord les cochonneries qu’il y a dedans »
« [dans la cigarette électronique] vous n’avez plus toutes les substances cancérigènes qui sont promues par la combustion, la on passe d’un phénomène de combustion […] à un phénomène de vaporisation »
« Quand vous avez déjà cette absence de combustion, cette absence de cochonneries que sont les goudrons, les benzopyrènes vous diminuez le risque de façon assez fabuleuse ».
« substituer la cigarette, c’est déjà se sevrer de cette cochonnerie cancérigène »

A la question sur la dangerosité de la nicotine qui crée rait l’addiction il répond :


« la nicotine entraîne une dépendance mais d’autres molécules dans la cigarette sont certainement aussi addictogènes voire plus que la nicotine. Est-ce que c’est dangereux, oui par l’intermédiaire de la dépendance qui va vous faire fumer des grosses cochonneries comme les goudrons ou les benzopyrènes […]mais en terme de substance elle même elle est faiblement toxique »

Le fantasme d’une distribution exclusive en pharmacie…

Par contre quand on lui dit qu’il y a tout de même des substances non anodine comme le propylène glycol ou la glycérine végétale il parle de la


« nécessité de réglementer cette promesse thérapeutique extraordinaire si l’on ne veut pas se retrouver un jour avec des business players qui mettent sur le marché de l’antigel ou de la viande de cheval », « la nécessité de réglementer cette promesse thérapeutique extraordinaire qu’est la cigarette électronique, qu’elle soit certifiée au moins comme un dispositif médical de classe 1. » « mieux vaut avoir[…]un pharmacien qui vous accompagne dans votre démarche thérapeutique pour diminuer votre niveau de nicotine pour éventuellement vous aider un jour à arrêter même la cigarette électronique

En parlant de l’engouement pour la cigarette électronique des fumeurs souhaitant arrêter de fumer :


« comment continuer de surfer sur cette vague là en la cassant pas mais en la réglementant à minima […] à mon avis il y a un système sanitaire exceptionnel qui s’appelle médecins et pharmaciens en France ».
« ce qu’on veut c’est que ce soit quand même les pharmaciens qui puissent vérifier que ce ne sont pas des mineurs qui vont s’initier à la cigarette électronique et qui vont pouvoir avec proximité accompagner les gens dans leur démarche thérapeutique »

…se heurte à plusieurs écueils et serait certainement défavorable au consommateur

Les propos du Docteur Lowenstein sur la cigarette électronique sont très positifs et son souhait d’une commercialisation en pharmacie part d’un bon sentiment et il est tout à fait dans son rôle en défendant la sphère médicale.

En s’exprimant il semble englober l’avis du corps médical sur la réglementation. Il serait assez surprenant vu ses fonctions qu’il n’ait pas échangé sur le sujet avec le Professeur Dautzenberg en charge du rapport demandé par le Ministre de la santé Marisol Touraine. On pourrait donc peut être voir dans ses déclarations des fuites sur ce rapport.

Lorsqu’il parle d’une réglementation de la cigarette électronique au moins comme un dispositif médical de classe 1, cela impose de faire un dossier assez lourd de la part des fabricants (un peu moins si c’est seulement de classe 1 et pas d’une classe supérieure), lequel prendra certainement un certain temps pour aboutir. L’entrée en vigueur d’une telle réglementation devrait donc obligatoirement se faire après une période de transition.

Ensuite, il est évident que toutes les marques et modèles de cigarette électronique ne pourront pas figurer en pharmacie. Les modèles de type Ego Stardust V3 sont certainement les plus efficaces pour les gros fumeurs. Mais d’expérience certains fumeurs ont un blocage psychologique sur ce type de modèles qui ne ressemblent pas à une cigarette (voir cet article) et leur préfère des modèles comme la cigarette électronique KR808 . Il est donc important de proposer une certaine diversité. De même, de nombreux vapoteurs finissent par s’éloigner d’arômes tabac pour basculer vers des goûts fruités ou gourmands. On imagine difficilement une profusion de choix dans les pharmacies.

L’autre problème, d’ordre matériel serait l’impossibilité des pharmacies à faire face à l’afflux des vapoteurs venant régulièrement chercher leurs liquides pour cigarette électronique. Les pharmaciens n’auraient plus le temps de donner des conseils à qui que ce soit dans ce cas. On assisterait vraisemblablement à des files d’attente de vapoteurs mélés à des « vrais malades » qui vont chercher leurs médicaments. Mais il est probable que de nombreux fumeurs ne prendront pas la route de la pharmacie car il ne se considèrent justement pas comme des malades et n’arrêteront donc pas d’inhaler « les cochonneries » évoquées par le Docteur.

Le consommateur y perdrait également certainement en terme de prix du fait d’une concurrence réduite au minimum.

Le Docteur Lowenstein a tout de même raison sur le fait qu’il faut réglementer les composants et les conditions de fabrications des liquides pour cigarette électronique. Il y a des différences colossales, notamment en Chine comme je l’avais mis en évidence dans le lien ci-dessus et il est évident qu’il y a des différences entre des liquides fabriqués de façon artisanales en mélangeant des bases et des arômes dans un environnement non adapté et  une usine comme celle de Flavour Art. La question de certains composants comme l’alcool (ethanol) présent dans certains liquides (notamment américains) soulève également  de plus en plus d’interrogations chez les vapoteurs.

Pour rappel, par exemple, les arômes des eliquide Flavour Art contiennent uniquement des ingrédients validés par l’Autorité européenne de sécurité des aliments et ne comportent pas d’alcool (éthanol) ,de gluten, de sucre, de protéine, d’organisme génétiquement modifié, d’ingrédient d’origine animal, de diacétyle, d’ambrox, de paraben, de conservateur, d’édulcorant ou colorant.
Sans être aussi stricte, une réglementation sur cette base serait déjà un bon point car il faut bien entendu éviter que les fabricants introduisent des substances reconnues comme nocives ou potentiellement addictives en plus de la nicotine.

A quand les fruits et légumes dans les pharmacies ?

Mediator

Le médiator : vendu en pharmacie mais un scandale sanitaire

Selon le Docteur Lowenstein, avec la cigarette électronique les fumeurs doivent pouvoir continuer de bénéficier d’un encadrement thérapeutique qu’ils ont actuellement avec leur tabacologue et leur pharmacien avec l’achat de substitut nicotinique. Délivrer la cigarette électronique en pharmacie sous ce prétexte et parce qu’il faut un produit thérapeutique contrôlé n’a pas de sens.
Déjà, il est évident qu’il ne faut pas qu’un produit soit vendu en pharmacie pour qu’il soit sûr. N’oublions pas le scandale du mediator et de la pillule Diane 35.
De plus, le Docteur Lowenstein le dit lui même « [certains fumeurs] veulent continuer de fumer mais sans en mourir ce qui est légitime » et « substituer la cigarette, c’est déjà se sevrer de cette cochonnerie cancérigène » : la cigarette électronique n’est pas forcément un dispositif de sevrage tabagique mais plutôt une alternative moins nocive.

Fruits et légumes

Un nouveau rayon de pharmacie ?

Quoiqu’il en soit pour se rendre compte de l’absurdité d’une telle mesure, on peut faire un parallèle finalement pas si capillotracté que cela avec les personnes souffrant d’obésité. Dans certain cas il s’agit d’une dépendance comportementale à l’ingestion de nourriture, et souvent une nourriture trop riche en sucre, lipide…Comme pour les fumeurs, ces individus peuvent consulter un médecin (nutritionniste) et acheter des produits pour les aider en pharmacie. Or, on sait que si certains individus pouvaient boire de l’eau et manger des fruits et des légumes à la place de boissons gazeuses et frites ils iraient beaucoup mieux. Pourtant, les fruits et légumes peuvent potentiellement contenir des pesticides, être génétiquement modifiés…et donc comporter des risques pour la santé s’ils ne sont pas contrôlés. On peut donc tout à fait avec un raisonnement analogue proposer que les fruits et légumes soient délivrés en pharmacie…

Bien entendu, ce n’est pas exactement la même chose et on pourra m’accuser d’être partisan cependant en tant qu’utilisateur cela me semble du bon sens. N’hésitez pas à ajouter en commentaire si vous avez également une opinion sur la question.

Vous avez trouvé cet article instructif ? Ajoutez nous dans vos cercles Google+ et devenez fan de notre page Facebook en cliquant sur les logos à gauche de l’écran.

Sylvain Filatriau

 

4 réflexions au sujet de « Cigarettes électroniques en pharmacie : une fausse bonne idée »

  1. Bonjour : j’ai trouvé cet article très intéressant. Ex grosse fumeuse depuis 20 ans, je fais maintenant avec bonheur partie des « vapoteurs » qui ont grace à cette petite merveille enfin cessé de fumer après avoir essayer des tas de méthodes ayant échoué.
    Bien-sûr qu’il m’arrive parfois de me poser des questions sur la totale innocuité de ce que j’inspire : je pense que c’est là, la vraie question (effectuer des contrôles réguliers par exemple sur certains lots de liquides pour s’assurer que ce qu’il y a dedans correspond parfaitement à ce qu’il y a sur l’étiquette du flacon)… Mais surtout, maintenant que je suis débarrassée de mes odeurs de cendriers pleins, que j’ai retrouvé depuis 4 mois maintenant une capacité respiratoire (je ne tousse plus le matin), un teint moins terne, et qu’en plus je fais des économies… tout en vapotant avec plaisir mais surtout la certitude que je ne mets pas la santé de mon entourage ni la mienne en danger, eh bien je me dis que vapoter c’est bien mieux que de se tuer chaque jour à petit feu… et j’aimerais bien continuer à vapoter tranquille…
    Lorsque je vais me réapprovisionner en liquide, je suis souvent surprise qu’il y ait déjà une telle file d’attente chez XXXXX, alors comme vous le soulignez fort bien : impensable que les pharmaciens puissent faire face à la demande… D’autre part, comme vous le soulignez aussi « tout ce qui est vendu en Pharmacie n’est pas forcément sans danger » : Médiator et bien d’autres produits sont régulièrement retirés des pharmacies… Il s’agit là d’un faut débat… Je pense surtout qu’en réalité, l’engouement pour la cigarette électronique représente un marché lucratif pour les distributeurs… qui échape aux pharmacies sans compter la baisse des ventes de gommes à mâcher et des patchs à la nicotine… Et les loby pharmaceutiques ont la dent longue : pas question qu’un marché juteux ne leur échappe… sans compter qu’en plus il faut bien le dire même si ça paraît cynique : ça les inquiète aussi de savoir que si la cigarette électronique supplante en quelques années la consommation de tabac, cela voudra dire une baisse énorme des cas de cancers du poumons… Toutes ces chimiothérapies coûtent très chers aux français en creusant le déficit de la sécurité sociale… mais profitent énormément aux… labos pharmaceutiques !!!
    Alors moi je voudrais que l’hypocrisie cède la place aux avis des vapoteurs… Et si le principal diffuseur a eu une idée de génie, qui peut sauver des vies, et qu’il s’enrichit avec, eh bien tant mieux pour lui ! Et bravo pour votre article.

    • Bien que trouvant cet article intéressant, je n’en reste pas moins consterné par le commentaire laissé ! Comment peut-on prétendre dénoncer une hypocrisie des labos pharmaceutiques pour un marché qui leur échappe et des chimiothérapies qui seraient en nette diminution de « vente » ??? Il s’agit ici de la question des points de vente, à savoir les pharmacies d’officine, qui ne sont quasi-jamais des points de délivrance des thérapeutiques lourdes dans le cadre de cancers pulmonaires, les traitements les plus fréquents et onéreux étant réservés au circuit hospitalier ! Attention à ne pas faire l’amalgame entre un pharmacien officinal titulaire de son officine, et les laboratoires producteurs ! Le pharmacien est un professionnel de santé, qui ne peut qu’encourager les innovations améliorant la santé publique, un code de déontologie exist, un ordre et une inspection surveillent le pharmacien. Sachez madame que la santé reste l’enjeux majeur et principal des pharmaciens. Si le votre n’est pas dans cette optique, alors c’est sans nul doute une brebis gâleuse qui ne reflète en rien la profession. Vous avez le choix d’en changer d’ailleurs.
      Le marché de la production est, il me semble, accessible à ces labos pharmaceutiques s’ils le désirent, donc merci d’éviter ce genre de propos faux et absurdes.
      Concernant ensuite le Mediator et la Diane 35 (remise au goût du jour cela dit en passant), il est évident que des scandales sanitaires existent. Mais ne croyez-vous pas que la qualité du circuit de distribution des pharmacies d’officine soit un plus pour le sevrage tabagique ? Ne confondez pas les responsabilités des fabricants et des organismes de tutelle avec le sérieux des grossistes-répartiteurs et des officinaux. Un professionnel de santé qui assure un suivi de ses patients, je pense que dans la substitution nicotinique, cela reste un avantage certain.
      Et concernant enfin la « queue » éventuelle, il y a plus de 22 000 officines sur le territoire, avec un maillage géographique très développé. « L’afflux » des patients serait relativement bien géré j’ose le croire.
      Sur ce, je rest évidemment ouvert au débat.

    • Véronique, change de pharmacien si le tien souhaite que tu aies un cancer !
      Le mien est sympa, il m’a déjà bien aidé à arrêté avec des pachs, mais j’ai rechuté… Qd est sortie la e cigarette, je lui en ai parlé et il m’a proposé la Tag (j’ai esayé Duo Ego avant). J’ai complétement arréter la vrai cigarette en qqs mois et maintenant je diminue la e cig.
      Il y a parfois de la queue à la pharmacie, mais il y en a plus chez les boutiques, pour qualité incertaine.
      Dans le match Cigarettiers/Mediator, les vainqueurs sont sans conteste les Cigarettiers avec environ 73 000 morts/an rien qu’en France. Et vous voulez que je leur confie ma santé ???

    • Bonjour chère madame,

      Tout d’abord félicitations pour votre arrêt du tabac, puisqu’apparemment vous le souhaitiez vraiment.

      Je tiens avant tout à ajouter que je suis pro-Ecig, à partir du moment ou la personne ne vient pas cracher la fumée sur moi (c’est une question de politesse envers les non-fumeurs et les personnes plus généralement).
      Je veux juste rebondir sur un argument de votre commentaire : quand vous dites que les pharmacies distribuent beaucoup de produits potentiellement dangereux : par définition, tout médicament est potentiellement dangereux, c’est pour celà qu’avant sa commercialisation, il doit subir l’examen de son dossier par l’ANSM, qui, notamment, doit juger du bien-fondé de ce qu’on appelle l’analyse bénéfice/risques de la substance médicamenteuse proposée. Cette analyse bénéfice/risque, veut en fait dire que la substance proposée ne doit pas poser au patient plus de problèmes que le bénéfice attendu.
      C’est quelque chose qui est très subjectif selon moi, je prends un exemple bien connu de nos jours : les médicaments anti-acné pour les adolescents.

      Le bénéfice de ces molécules est de réduire la quantité de points noirs et autres boutons sur la peau des adolescents. C’est ce que j’appelle un médicament de confort.
      Les risques (j’en oublie surement et je ne citerai que les plus dangereux) : atteinte au foie (le foie sert d’organe éliminant les substances étrangères, imaginez la nocivité du médicament, sachant que les cures sont des cures de 3-4 mois renouvelables, l’alcool prend plus de temps), douleurs musculaires, nausées etc etc.

      Vous voyez les bénéfices pour un médicament de confort ? Pourtant ces médicaments ne sont pas prêt d’être interdits.

      Bref, je m’éloigne : tout médicament est potentiellement dangereux, c’est d’ailleurs bien pour ça que des professionnels sont formés pour les vendre. Il n’y a pas de médicaments 0 dangers, juste d’énormes boites pharmaceutiques qui font des analyses bénéfices/risques parfois très limites, et qui sont accordés par l’ANSM (ex-AFSSAPS).
      Même l’ibuprofène peut, dans des cas rarissimes, provoquer une inflammation chronique des intestins.

      Voilà, j’avais juste ce point qui m’avait fait un peu lever un sourcil.

      Sinon je suis tout à fait d’accord avec vous : avec de bons contrôles qualités sur les produits (Ecig, carburant etc etc), il ne devrait pas y avoir plus de soucis que ça

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


+ quatre = neuf

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>