Groupe de travail sur la cigarette électronique : des avis d’experts partisans

Le groupe de travail sur la cigarette électronique de la Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI) s’est tenu le 07 mai 2013. Après la réunion du 24 avril et compte tenu des intervenants mentionnés dans l’agenda de ce workshop, on pouvait craindre un traitement inéquitable de la Ecigarette. Cet article fait le point sur les différentes présentations qui ont été faites via l’éclairage du Docteur Farsalinos. Comme lors de la dernière réunion les avis des eurodéputés qui se sont exprimés ont été très variés : certains sont visiblement pro-cigarette électronique mais beaucoup d’autres sont méfiants voire clairement hostiles. Parallèlement, le projet de position du 29 avril 2013 de la Commission des affaires juridiques (JURI) adressé à la Commission ENVI pourrait sonner le glas d’une réglementation de la cigarette électronique au niveau européen. Le rapport commandé par la Ministre de la santé Marisol Touraine deviendrait alors un élément crucial pour l’orientation de la réglementation en France.

Probablement la réunion la plus longue sur la cigarette électronique

L’agenda du workshop sur la cigarette électronique était précis et annonçait une réunion particulièrement longue puisque les participants ont pu aborder ce sujet épineux (comme ils aiment à le rappeler) pendant près de 3 heures.
Pour ceux qui ont du temps et veulent connaître avec précision tout ce qui a été dit, voici la vidéo de la totalité de ce workshop.

Analyse des présentations par le Docteur Farsalinos

Les supports des différentes présentations sont disponibles ici. Le Docteur Farsalinos en a fait une analyse sur son site dont voici la traduction :

Avant d’être informés de la liste des participants du groupe de travail, je pensais que cette réunion serait une excellente occasion d’informer les autorités de santé publique sur les données scientifiques actuellement disponibles sur la cigarette électronique.

Cependant, quand j’ai vu le programme et les conférenciers qui ont été invités, j’étais presque certain que ce serait une perte de temps. Malheureusement, ma prédiction a été totalement confirmé sur la base des diapositives des différentes présentations. Outre le professeur Etter, qui a fait quelques recherches et pouvait présenter ses conclusions (sur la base de preuves scientifiques réelles), aucun des autres participants n’a jamais participé à des recherches sur la e-cigarette. Le niveau de désinformation de cette conférence a vraiment été très surprenant. Plus précisement, certains des exposés ont constitué une scandaleuse désinformation en évitant soit la communication des données scientifiques déjà disponibles ou, dans certains cas en les présentant de façon déformées.

Pour commencer, le représentant de la European Respiratory Society (ERS) n’a pratiquement rien dit. Il s’agissait d’une amélioration majeure par rapport au communiqué de presse de l’année dernière de cette société concernant les cigarettes électroniques qui disait : «En général, la ERS souscrit au principe médical de primum non nocere et soutient que les utilisateurs de tabac ne doivent pas échanger un produit cancérogène pour un autre… ». La différence entre cette position et l’actuelle est frappante. En outre, plusieurs interrogations exprimées ont déjà été étudiées. Les émissions de E-cigarettes ont été examinées par 3 études, Schripp et ses collègues, qui comparent les émissions du tabac et de la cigarette électronique. Ils ont testé 20 produits chimiques rejetés dans l’environnement. Chacun d’eux étaient présents dans la fumée de cigarette, seulement 6 étaient présents dans la vapeur de e-cigarette, à des niveaux 2,5 (acétone) à 50 fois (acétaldéhyde) inférieurs à ceux des cigarettes. Romagna, Farsalinos et leurs co-auteurs ont présenté lors du congrès 2012 de la Société de recherche sur la nicotine et le tabac, des résultats d’une étude comparant le « vapotage passif » et le tabagisme passif. Ils ont trouvé 10 fois moins de composés de carbone organique et l’absence totale de substances toxiques comme l’acroléine, le toluène et les hydrocarbures aromatiques polycycliques. McAuley et ses collègues n’ont constaté « aucun risque apparent pour la santé humaine des émissions de e-cigarettes ».
Le représentant de la ERS demande des essais cliniques et des études post-marketing. Nous sommes d’accord avec cela, et en fait cela appuie l’idée que les e-cigarettes devraient être disponibles pour le consommateur (sinon de telles études ne pourraient être effectuées). Globalement, d’autres études devraient être menées, mais cela ne signifie pas que nous ne savons rien.

La présentation du Professeur Pisinger était une grande, mais désagréable, surprise. Dans un premier temps, elle décrit un fait évident : nous devons encore attendre plusieurs années et plusieurs milliers d’utilisateurs afin de déterminer les conséquences à long terme de l’utilisation de la e-cigarette. Puis, quelques déclarations étranges ont été faites. Par exemple: “Mostly only “traces” of toxins but the inhaled aerosol undergoes changes in the human lung ». Il s’agit d’une déclaration vide de sens. Des changements dans les poumons (s’ils se produisaient) ne pourraient jamais augmenter la quantité de toxines (ou nous devons rejeter la théorie de la relativité). Elle voulait sans doute dire autre chose. Ensuite, elle a fait un choix d’images illustratives particulièrement malheureux (Humour? Je n’ai pas réussi à le comprendre. L’étiquetage insuffisant sur la nicotine n’est pas dangereux en soi, c’est déjà le cas avec les cigarettes classiques depuis que les autorités acceptent la méthode ISO pour définir la teneur en nicotine dans la fumée de cigarette) et enfin, elle se réfère à des rapports sur les risques de la e-cigarette. Elle a mentionné une «Augmentation du nombre d’effets indésirables, la plupart avec lien de causalité ». Les données proviennent de la FDA, comme elle le mentionne, toutefois la FDA rapporte avoir reçu 47 rapports d’effets indésirables depuis 2008 : 8 d’entre eux étant sérieux (sur les 4 dernières années). En outre, les auteurs mentionnent: «Il est à noter qu’il n’existe pas nécessairement de lien de causalité entre les effets indésirables signalés et l’utilisation de la e-cigarette, comme certains effets indésirables pourrait être liés à des conditions pré-existantes ou dues à d’autres causes non déclarées.».Le Professeur Pisinger a soutenu exactement le contraire! Intéressant … Enfin, elle soutient que le sevrage tabagique est possible et présente un graphique qui ne représentent pas le sevrage tabagique. La différence en % de fumeurs entre 1950 et 2010 n’est pas une information sur le sevrage tabagique, mais plus probablement sur le nombre de personnes commençant à fumer (lequel est moindre). Malgré cela, le professeur Pisinger pense-t-elle que la prévalence du tabagisme de 25% dans la population n’est pas importante et que ces personnes ne doivent pas bénéficier de produits de réduction des méfaits du tabac?

Le professeur Etter a fait une excellente présentation, mais c’était juste l’exception dans l’environnement hostile de la commission ENVI.

Presque toutes les personnes invitées ont exprimé leur préoccupation sur «l’inconnu», en ignorant la variété des données déjà disponibles sur les composants du liquide et de la vapeur de e-cigarette. Globalement, aucune mention n’a été faite sur des études toxicologiques et chimiques qui ont montré que les e-cigarettes (indépendamment de leur qualité de production) sont de loin moins dangereuses par rapport au tabac. Ne serait ce qu’en Grèce, plus de 300 liquides ont été testés par des laboratoires universitaires indépendants, et aucun ne présentaient de nitrosamines ou d’hydrocarbures aromatiques polycycliques à des niveaux considérés comme dangereux. De toute évidence, nous devons attendre plusieurs années pour voir les effets à long terme, mais le potentiel des e-cigarettes pour neutraliser avec succès les effets indésirables du tabagisme sur la santé est indéniable! Et l’expérience actuelle a montré que même si les responsables de santé publique évite de regarder les preuves matérielles, les tribunaux et les juges ne les ignorent pas.

Docteur Konstantinos Farsalinos

Et pendant ce temps…la commission des affaires juridiques de la Commission européenne remet en cause la réglementation de la cigarette électronique proposée par la Commission ENVI

La commission des affaires juridiques de la Commission européenne (JURI) a envoyé un projet de position sur la directive des produits du tabac à la Commission ENVI lui conseillant de retirer l’article 18 concernant les produits contenant de la nicotine (dont bien entendu les cigarettes électroniques). La Commission JURI ajoute qu’il n’est pas du tout évident de classer ces produits moins nocifs que les produits du tabac comme des médicaments ce qui signifierait leur interdiction. Or, il est précisé qu’ interdire des produits qui sont moins nocifs que les produits du tabac et pouvant être une méthode de sevrage tabagique n’est certainement pas en accord avec les objectifs de santé publique visés.

Ainsi la directive sur les produits du tabac de la Commission ENVI perdrait de sa substance et le rapport demandé par la Ministre de la santé deviendrait potentiellement décisif pour l’avenir de la cigarette électronique en France.

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Sylvain Filatriau

 

 

 

Une réflexion au sujet de « Groupe de travail sur la cigarette électronique : des avis d’experts partisans »

  1. Pourquoi vouloir mettre les battons dans les roues à l’e-cigarette ? Non vraiment la nicotine c’est le mal ? Et l’alcool en libre service à tout coin de rue ? Et les pubs sur les sucreries partout à la télé et dans le métro ? Je rappelle que le surpoids et l’obésité représentent le cinquième facteur de risque de décès au niveau mondial. Sans compter certains traitements vendus en pharmacie pour se calmer (weh se shooter quoi). Bref… Moi j’y vois encore de la magouille politique derrière.

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