Ecigarette : risque d’initiation des jeunes au tabac, d’intoxication et d’accident ?

Les ados vont-ils vraiment être accrocs à la nicotine à cause de la ecigarette ?

Les ados vont-ils vraiment être accrocs à la nicotine à cause de la ecigarette ?

L’argument massue pour tous les détracteurs de la cigarette électronique est : « c’est une porte d’entrée vers le tabagisme et en particulier chez les jeunes ». C’est justement avec ce préjugé que l’Union Européenne a rédigé une directive particulièrement restrictive sur la ecigarette en pointant du doigt que les e-liquides contiennent de la nicotine et donc sont potentiellement dangereux et addictifs. Pour ce qui est de la dangerosité, c’est ce qui a motivé un texte qui limite les contenants de E-liquide. Seulement voilà, comme un groupe de scientifiques l’a fait remarqué dans une lettre ouverte à la Commission, ces arguments dégoulinants de préjugés ne tiennent pas du tout la route face aux études scientifiques.Dans ce billet, vous trouverez la partie de la méta-analyse des Docteurs Polosa et Farsalinos consacrée aux potentiels risques de la cigarette électronique : explosion, incendie mais surtout risque d’initiation des jeunes au tabac et d’intoxication à la nicotine. Finalement, les rumeurs confrontées à la rigueur scientifique font vite long feu.

Si vous êtes intéressés par les autres études sur les liens ecigarette/santé, je vous invite à aller lire ces différents billets :

Introduction et méthodologie (épisode 1),
Nicotine, cigarette électronique et dépendance (épisode 2),
- Les études sur la composition chimique des produits (épisode 3),
Les études toxicologiques (épisode 4),
Les études cliniques et les enquêtes (épisode 5),
Tabagisme et vapotage passif (épisode 6),
- Risques de la ecigarette : tabagisme des jeunes, intoxication à la nicotine, explosion (épisode 7 = l’article que vous êtes en train de lire),
La cigarette électronique : positive pour certaines pathologies ? (épisode 8),
Synthèse et conclusion de la revue de littérature sur la ecigarette (épisode 9).

L’étude est disponible en intégralité en anglais sur ce site en téléchargement  : Safety evaluation and risk assessment of electronic cigarettes as tobacco cigarette substitutes: a systematic review.

Exposition accidentelle à la nicotine

Les vomissements : premiers symptômes d'intoxication à la nicotine sont extrêmement rares.

Les vomissements : premiers symptômes d’intoxication à la nicotine sont extrêmement rares.

L’ingestion accidentelle de nicotine, en particulier par des enfants, ou le contact avec la peau avec de grandes quantités de liquide très concentré ou de solution de nicotine peut être problématique. Cependant, la référence historique de la dose létale de 60 mg a été récemment remise en cause suite à un examen de Mayer [Mayer, 2013]. Il a constaté que les concentrations létales citées dans tous les documents provenaient d’expériences douteuses réalisées au 19ème siècle.En s’appuyant sur des études post- mortem, il a suggéré que la dose aiguë associée à une issue fatale serait de 500-1000 mg. Tenant compte du fait que de forts vomissements sont la première caractéristique des symptômes d’ingestion de nicotine, il semble que des niveaux bien plus élevés de nicotine doivent être ingérés pour avoir des conséquences mortelles.

Faire attention aux produits nicotinés comme on fait attention avec les produits ménagers.

Un système de surveillance des événements indésirables a été mis au point par la FDA (Food and Drug Administration), qui identifie les problèmes sanitaires liés aux produits du tabac. Depuis 2008, 47 événements indésirables ont été signalés au sujet des cigarettes électroniques. [Chen, 2013]. Huit d’entre eux étaient liés à des évènements graves tels que des hospitalisations pour pneumonie, des insuffisances cardiaques,des hypotensions et des brûlures. Un cas de brûlure au second degré a été causé par une explosion de batterie, ce qui est généralement un problème lié aux batteries au lithium et ce qui est déjà arrivé avec d’autres produits ( tels que les téléphones mobiles ). L’auteur a souligné que les événements rapportés n’étaient pas forcément associés à l’utilisation de la ecigarette, mais pouvaient être liés à des conditions pré-existantes ou d’autres causes. Aucune raison n’était clairement associée à l’utilisation de la e-cigarette. Une étude récente à partir de la base de données du système antipoison de Californie de 2010 à 2012 a identifié 35 cas (14 enfants) associés à l’exposition à la cigarette électronique (exposition accidentelle dans 25 cas) [ Cantrell,2013]. Au total, cinq patients ont été évalués dans un service d’urgence et tous en sont sortis dans les 4 heures. Nausées, vomissements, vertiges et irritation orale ont été les symptômes les plus fréquemment rapportés. Pris ensemble, les données des systèmes de surveillance sur les effets indésirables suggèrent que des effets négatifs à court terme et des expositions accidentelles aux contenants des cigarettes électroniques étaient peu susceptibles d’entraîner une toxicité grave.

Cependant, il reste important d’éviter le contact avec une solution de nicotine hautement concentré ce qui peut être fait notamment avec un étiquetage des produits, une fermeture à l’ épreuve des enfants et une bonne éducation des consommateurs. Il n’existe aucune preuve indiquant qu’il faudrait que les liquides de cigarette électronique contenant de la nicotine soient traités différemment des autres produits de consommation utilisés tous les jours pour le ménage (comme l’eau de Javel, la poudre de lave-linge, etc.)

Les accidents électriques et les incendies

L’équipement électronique des cigarettes électronique peut provoquer des accidents. Les e-cigarettes sont principalement composées de batteries au lithium. Il y a eu des cas d’explosions de batteries, causés soit par une charge prolongée et l’utilisation de chargeurs inappropriés ou causés par des défauts de conception. Des accidents similaires ont eu lieu avec des batteries d’autres appareils courants, tels que des téléphones mobiles. Par conséquent, ceci n’est pas spécifique à la ecigarette. Cependant, des normes de production de qualité doivent être appliquées afin d’éviter de tels accidents.

La cigarette classique est responsable de nombreux incendies domestiques mortels

La cigarette classique est responsable de nombreux incendies domestiques mortels

Le tabagisme est une cause majeure d’incendies résidentiels. Entre 2008 et 2010, on estime que chaque année, en moyenne, 7600 incendies liés au tabagisme ont lieu dans des bâtiments résidentiels aux États-Unis [ US Fire Administration, 2012]. Ils ne représentent que 2 % de tous les incendies dans les bâtiments résidentiels, mais représentent 14 % des décès par incendie. Puisque les cigarettes électroniques ne sont activées que lorsqu’elles sont utilisées et qu’il n’y a pas de combustion, il est possible d’éviter le risque d’incendies liés au tabagisme.

Utilisation par les jeunes et les non-fumeurs

Dans le cadre de cette revue de littérature, il est important de discuter brièvement de la potentielle dépendance induite par l’utilisation de la cigarette électronique. Il faut reconnaître que la nicotine crée une dépendance, mais des études récentes ont montré que l’association avec plusieurs autres produits chimiques présents dans le tabac augmentait significativement la dépendance de la nicotine [Lotfipour et al. 2011; Rose, 2006; Guillem et al. 2005]. Ainsi, l’absorption de nicotine ne devrait pas être recommandée pour les non-fumeurs. Mais puisque les fumeurs sont déjà accros à la nicotine, la e-cigarette serait juste une forme plus propre d’administration de la nicotine alors que parallèlement, ils maintiennent leur stimulation sensorielle et bénéficient d’une simulation de l’action de fumer. Ces derniers points sont des aspects importants de la dépendance au tabagisme.

Les autorités de réglementation ont exprimé leur préoccupation au sujet de l’utilisation par les jeunes de la cigarette électronique dans le cas où il n’auraient jamais fumé.  La cigarette électronique deviendrait alors une passerelle vers le tabagisme ou une nouvelle forme de dépendance. Cependant, ces préoccupations ne sont pas fondées. La recherche a montré que l’utilisation de la e-cigarette par les jeunes est pratiquement inexistante, sauf s’ils sont fumeurs.

Les jeunes qui ont essayé la cigarette électronique sont presque tous des fumeurs.

Les jeunes qui ont essayé la cigarette électronique sont presque tous des fumeurs.

Camenga et ses collègues [Camenga et al. 2013] ont examiné l’utilisation de la e-cigarette et du tabac chez un groupe d’adolescents, dans une enquête menée en trois vagues. Dans la première vague de l’enquête (février 2010), 1719 adolescents ont été interrogés avec seulement un non-fumeur qui utilisait la cigarette électronique. Dans les deuxième et troisième vagues de l’enquête, seulement cinq adolescents non-fumeurs utilisaient la ecigarette. En fait, ce sont les adolescents qui ont déclaré avoir déjà utilisé une cigarette électronique dans les 30 derniers jours; par conséquent, ils ne sont pas nécessairement consommateurs réguliers ou quotidiens de cigarette électronique. L’augmentation de la prévalence de l’utilisation de la cigarette électronique est passée de 0,9 % en 2010 à 2,3 % en 2011 sur les adolescents fumeurs concernés. Cela doit donc être considéré comme un résultat positif que des fumeurs expérimentent des cigarettes électroniques, lesquelles sont moins nocives.

De même, la Medicines and Healthcare Products Regulatory Agency (MHRA) a constaté que moins de 1 % des utilisateurs de cigarette électronique n’ont jamais fumé [ MHRA, 2013]. Les données du Centers for Disease Control [2013] National Youth Tobacco Survey a rapporté un doublement de l’expérimentation de la cigarette électronique chez les élèves de 13-18 ans passant de 1,1% en 2011 à 2,1% en 2012, mais 90,6 % d’entre eux étaient des fumeurs. Sur l’ensemble de la population, seuls 0,5 % étaient des non-fumeurs qui ont expérimentés la cigarette électronique. Une fois de plus, les participants ont été interrogés sur le fait de na pas avoir essayé la cigarette électronique sur les 30 derniers jours, ce n’est donc pas une mesure d’utilisation  régulière ou quotidienne.

Récemment, un sondage auprès de plus de 75 000 étudiants en Corée du Sud a été publié [ Lee et al. 2013]. Bien que les auteurs aient constaté que 12,6% d’entre eux étaient des fumeurs quotidiens (8,6 % utilisaient uniquement des cigarettes classiques et 3,6% consommaient à la fois du tabac et utilisaient la cigarette électronique), seulement 0,6 % des non-fumeurs avait utilisé la e-cigarette dans les 30 derniers jours. Bien que les données mentionnées ci-dessus aient été utilisées comme arguments pour soutenir le fait qu’une nouvelle épidémie de dépendance à la nicotine à cause de l’utilisation de la ecigarette émergeait, en réalité, cela montre que toute expérimentation de la cigarette électronique est faite par des fumeurs. C’est en fait un résultat positif  qui pourrait conduire à réduire la prévalence du tabagisme par l’adoption de l’utilisation de la ecigarette. Par conséquent, la cigarette électronique pourrait servir de sortie du tabagisme, a contrario il n’existe aucune preuve qui indique qu’elle pourrait être une passerelle vers le tabagisme. Il est encourageant de voir que la pénétration de l’utilisation de la e-cigarette chez les jeunes est pratiquement inexistante, surtout quand on prend en considération qu’il n’y a actuellement aucune réglementation officielle dans la plupart des pays visant à interdire l’accès de la e-cigarette aux jeunes.

Ainsi la directive européenne sur les produits du tabac prévoit une contenance minimal pour les eliquides qui ne s’appuie pas sur des données scientifiques. Par ailleurs, considérer que la cigarette électronique est une porte d’entrée vers la dépendance en particulier chez les jeunes est une aberration scientifique qui repose sur des a priori mais pas sur des faits. La cigarette électronique dérange par son côté novateur. Les conservateurs ont peut et dans le doute privilégie même la cigarette classique, ce qui est une ineptie sanitaire. Bien entendu en théorie, la ecigarette ne devrait pas être utilisée par les non fumeurs mais pour les fumeurs il y a bien une réduction très conséquentes des risques pour la santé.

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Sylvain Filatriau

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